Un peu d'histoire Nous sommes à l’aube des années 80, cela fait déjà 7 ans que la Bagheera existe, ce coupé « gentil » commence à dater comparé à la concurrence de l’époque,
la Bag n’a pas pu évoluer suffisamment mécaniquement, un comble pour un motoriste qui a su rayonner dans les années 70 par son fabuleux V12.
Cependant la panthère restait dans le coup grâce à son poids contenu, son aéro et son petit moteur Simca rageur ;
malgré cela la boîte 5 tant attendue ne parviendra jamais à célébrer la fin de carrière de cet engin atypique.
Ainsi la petite firme préparait son cahier des charges pour succéder à ce modèle qui laissait un sentiment d’inachevé,
son châssis fabuleux était sous exploité par les 90ch du modèle S.
L’idée d’implanter un plus gros moteur puisé dans la banque d’organes Simca Chysler semblait la solution la moins coûteuse.
Matra-Simca devint Talbot-Matra en 1979. Le partenaire technico-commercial de Matra Automobile sera dès lors le groupe P.S.A.
Matra pouvait dès lors puiser dans la banque d’organes mécaniques du groupe représentant les marques Peugeot, Citroën et Talbot.
Pour une mécanique de 2 litres de cylindrée, Matra pensait pouvoir disposer du tout nouveau moteur tout alu issu de la collaboration P.S.A.-Renault
construit par la société Française de Mécanique.
Ce moteur équipait la Citroën CX 2000 et Renault 20.
Par souci de simplification, il suffisait d’implanter cet ensemble moteur-boîte dans la Murena.
Matra s’est donc mis à la tâche jusqu’au moment où la régie Renault mettra son veto quant à exploitation de ce moteur
dans une voiture sportive qui allait logiquement concurrencer sa nouvelle Fuego équipée de la même mécanique.
La Murena 1.6 quant à elle, était prête à être commercialisée en septembre 1980.
Le public attendait en revanche une "Bagheera 2 litres" et Matra devait revoir tous ses plans de motorisation.
La seule solution résidait en l’adoption et en l’adaptation du moteur d’origine Chrysler 2 litres
dont la cylindrée venait d’être portée à 2156 cm³ pour équiper la "grosse" Talbot Tagora.
On s’est arraché les cheveux chez Matra car le délai était très court et il fallait concevoir l’implantation transversale
de ce "volumineux" moteur dans le châssis Murena prévu pour un groupe motopropulseur plus compact.
Matra a dû étudier un carter d’embrayage le plus court possible pour monter la boîte ; à l’autre extrémité du moteur,
il a fallu remplacer la pompe à eau de la Tagora par une pompe à eau spécifique, plus étroite, pour que le moteur entre au "chausse-pieds".
Un carter d’huile spécifique avec refroidissement à ailettes pour implantation transversale a dû être étudié.
Il a fallu également modifier la culasse de la Tagora pour adapter un support moteur supérieur central et remplacer le carburateur Weber de la Tagora par un Solex 34 CIC-141.
Extrérieur : Le design a été édicté par les choix techniques des ingénieurs maison; c’est avant tout un véhicule à moteur central transversal,
une solution qui présente plusieurs avantages : un meilleur équilibre des masses, une consommation moindre grâce à un aérodynamisme
qui n’est pas conditionné par la face avant: hauteur de caisse réduite, une vivacité de conduite accrue.
Les lignes sont celles d’une voiture de sport basse cunéiforme (à l’image d’une Ferrari 308GT4, Lamborghini Urraco…), sa hauteur est de 1.22m,
sa longueur dépasse à peine 4, 03 soit moins qu’une Peugeot 207…
L’ensemble donne une ligne homogène dont la fluidité n’est pas perturbée par quelconque appendice aérodynamique,
le style : certains aiment, d’autres pas. Point final.
Je reproche peut être la largeur trop importante du véhicule qui est accentuée par la grande surface vitrée du pare brise.
Félicitons tout de même l’initiative Matra de persister dans l’image de la voiture de sport authentique au temps où le marché des bombinettes GTI 5 places polyvalentes commençait à exploser.
Intérieur et habitabilitéPhilippe Guédon, grand gourou de Matra Automobile reprend l’idée de base qui a fait le succès de la Bagheera.
Une voiture de sport par essence n’a que deux places, les places arrière des coupés 2+2 ne sont utilisées qu’occasionnellement, alors pourquoi pas 3 places ?
Cette 3ème place en largeur constitue ainsi une longue banquette ou bien offre un grand accoudoir central fort pratique rempli de poches diverses une fois rabattu, on n’a pas conçu le Renault Espace sans antécédents !
Le tableau de bord est moche… le volant horrible, la qualité de plastiques est discutable, ça manque cruellement de mousse pour flatter les essayeurs Auto-Plus
et ils ne pourront même pas déplorer sur le volume de la boite à gants puisqu'il n'y en a pas !
Une fois assis dans le siège conducteur très enveloppant moulé pour les gens pas très épais,
on ne voit plus le compte tours ni la vitesse instantanée mais on connait en permanence la pression d’huile,
température moteur (très important en ville avec un moteur central) et informations de moindre importance ; jauge à essence etc…
Les sièges en velours capitonné sont douillets, moelleux...
De couleur Miel, l'ensemble confère à la Murena millésime 81 une atmosphère chaleureuse qui dépeint avec le noir omniprésent d'une Golf GTi.
La mécanique Et voici l'objet du sacrifice, le fameux 4 cylindres longitinal Chrysler 5 paliers à arbres à cames en tête dont la conception remonte au début des années 70,
qui jouissait des mêmes raffinements technique que le bloc M10 des BMW Neue Klasse.
Le bloc moteur est en fonte bénéficie de cylindres usinés dans le bloc (pas de chemises), distribution par chaîne double, c'est du solide !
Ce moteur est robuste et sans soucis, il peut dépasser les 400 000 kms si l'entretien a été bien suivi. Il peut ainsi être soumis à d'intéressantes préparations.
Nous avons ici le 2Litres de la Chrysler 180 réalésé à 2155cc, il trouve ses origines dans des poids lourds américains, "Monsieur" fait son petit 150kgs tout de même :d
Il en ressort un comportement radicalement coupleux très agréable en ville, ce qui en fait un étonnant compromis,
le moteur n'aime pas trop les tours dans sa configuration d'origine.
Il atteint 118ch à 6300 trs/min, Matra n'ayant pas eu le temps de se pencher sur le berceau moteur en temps et heure...
une version plus puissante sortira à la hâte avec le kit 142, option qui transfigure le caractère de la bête.
Elle obtient des performances égales à la Alfa Romeo GTV6, Porsche 924, Alpine A310 V6, Mazda RX7, Lancia Beta Volumex...
Hélàs c'est déjà trop tard, les essayeurs reconnaissent toutefois les efforts consentis par Matra pour garder le coupé dans le coup
mais les kits 142 prévus pour le marché allemand, ou bien vendus à un prix salé dans le réseau Peugeot Talbot.
Les kits invendus seront installés de série au sein des ultimes Murena millésime 84 baptisées Murena S.
Ce moteur fut le fruit de nombreuses améliorations atmosphériques ou turbocompressées,
Matra tenta le triple allumage en compétition ou la culasse 16s qui sortait 180ch (soit mieux qu’une Lotus Esprit, le fameux proto Murena 4S à culasse ROC),
Danielson donnait des hauts moteurs atmo pour 155ch, Politecnic également.
Le vaillant Chrysler sert aussi de base moteur à la 505 Turbo Injection ou la BX 4TC, qui sortait + de 550ch en Superproduction qui l’aurait cru !
Les hollandais, pratiquent couramment le swap de moteur 505 Turbo kit PTS (200ch) la culasse est à peu de choses près identique.
La conduite Plaqué au sol, on ressent la route, la direction est hyper légère par l’absence de poids à l’avant et rend le coupé très vif à diriger.
La tenue de route est remarquable (en 1980…) , la voiture est scotchée au sol et freine fort (en 1980…),
les chronos sont honorables (en 1980…) 30sec au 1000m DA, presque 200km/h.
Son terrain de jeu reste les routes sinueuses en conduite coulée, pas besoin de tirer sur les rapports pour avoir une relance suffisante ;
la combinaison d’un rapport de pont long, volant moteur lourd engendre des accélérations linéaires soutenues
une fois que le deuxième corps du carburateur se soit ouvert après 3000 trs/min.
Ma mumu dispose d’un silencieux inox Devil qui donne au coupé un bruit sourd et métallique donnant l’illusion que l’on dispose d’un plus gros 4 cylindres.
Voici une petite idée de ce que cela peut donner à l’accélération en bourrinage 2è-3è-4è sur route ouverte ,
c’est looooooooong mais pourtant l’aiguille de vitesse grimpe aux environs de xxx à fond de 4ème.
Il est inutile d'aller chercher au dessus de 5000trs/min, le sommet de la courbe de couple est déjà loin.
Le guidage de boite est flou, je ne compte pas le nombre de ratages de 5ème sur autoroute après avoir déposé quelques Leon TDi [:hellypse],
cela peut s’améliorer comme énormément de choses c’est du quasi artisanal
(pipe admission, 2 plus gros carbus, tringlerie boite plus précise, volant moteur allégé, collecteur d'échappement à optimiser car mal conçu, etc…)
Sa conso reste raisonnable sur route, elle excède rarement les 9 litres en conduite souple et les 13 litres en ville.
BilanAprès plus de quatre ans avec en tant que véhicule unique, j’en retire surtout le plaisir de rouler différent,
dans un objet peu courant qui retient l’attention de nombreux passants qui malheureusement,
ignorent un morceau d’héritage de la gloire du sport automobile français de la fin des trente glorieuses, peu la reconnaissent bizarrement,
c'est surtout la Rancho qui aura marqué les mémoires.
Elle est une belle médiation pour déclencher des rencontres entres nostalgiques ou passionnés.